Canal Plus répudie son chasseur de pirates

La chaîne cryptée a rompu son contrat avec la société nantaise Trident Media Guard, qui conteste cette rupture devant le tribunal de commerce.
"Le groupe Canal Plus se tient aux avant postes du combat contre le fléau du piratage. Il en a toujours fait une priorité majeure", assurait la chaîne en avril.

"Canal Plus a un gros enjeu de piratage en France et en Afrique. Et ce piratage augmente, notamment en France. C'est un manque à gagner de 500.000 abonnés en France. En Italie, quand Canal a réglé le problème des cartes pirates, les abonnements ont explosé", ajoutait le président du directoire Maxime Saada devant l'Association des journalistes média en novembre 2016.

Pourtant, la chaîne cryptée, à la recherche d'économies tous azimuts, a répudié coup sur coup deux sous-traitants qu'elle utilisait pour chasser les pirates. Elle a d'abord mis fin à son contrat avec Thirel (qui travaillait pour elle depuis 2008), puis récemment avec Trident Media Guard alias TMG (qui travaillait aussi pour elle depuis dix ans).

Les deux bannis sont allés se plaindre au tribunal de commerce de Paris. Avec succès pour Thirel, qui a obtenu 3,1 millions d'euros de dommages. Quant à TMG, sa plainte pour "rupture brutale des relations commerciales", n'a été déposée qu'en janvier 2018, et n'a pas encore été jugée.

Fournisseur d'Hadopi

Basé à Nantes, TMG surveillait le web pour voir si circulaient des versions pirates des contenus de Canal Plus ou de sa filiale StudioCanal.

TMG a pour autres clients BeIn Sports, E1 Entertainment et surtout les sociétés d'auteurs françaises (Sacem, SCPP, SPPF, Alpa), qui, depuis 2008, demandent à TMG de récolter les adresses Internet des pirates sur les réseaux peer-to-peer. Ces adresses sont ensuite transmises à l'Hadopi qui envoie des avertissements aux pirates en question. Ce contrat commun dure jusqu'en 2019, précise la Sacem.

Thierry Lhermitte au capital

TMG est actuellement détenu par son PDG Alain Ghanime, son directeur technique et co-fondateur Bastien Casalta et l'acteur Thierry Lhermitte (qui a acheté 5% pour 55.000 euros).

En 2008, TMG avait levé 750.000 euros auprès du FCPR Ouest Ventures (250.000 euros en capital plus 500.000 euros sous forme d'obligations convertibles). Ce fonds, désireux de déboucler cette participation, est sorti en 2016, mais avec une moins value: TMG a racheté les actions du fonds pour seulement 536.000 euros. TMG a financé ce rachat notamment grâce à un prêt de 550.000 euros accordé par la BPA et le CIC.

A noter que le fonds et Thierry Lhermitte sont rentrés sur une valorisation de la société de 1,9 million d'euros, mais que le fonds est sorti en 2016 sur une valorisation de seulement un million d'euros.

Contacté, TMG n'a pas souhaité faire de commentaires. De son côté, Canal Plus indique avoir remis en jeu il y a deux ans les prestations de lutte contre le piratage via un appel d'offres, qui a été perdu par TMG mais remporté par Leak id, et que le contrat est désormais plus étendu, couvrant tous les territoires où est présent la chaîne.
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