Télévision: la Suisse va fermer ses frontières

« Une date historique. » C’est ainsi qu’un lecteur qualifie d’avance la date du 3 juin prochain, jour de l’arrêt de la diffusion des chaînes de télévision suisses hors des frontières du pays.

Cette disparition est d’abord liée à une contrainte budgétaire. Si l’initiative populaire « No Billag », visant à supprimer la redevance, a été rejetée par 71,6 % des votants l’an dernier, cette redevance a été plafonnée et la Société suisse de radiodiffusion et télévision (SSR) est désormais contrainte de réaliser 100 millions de francs d’économies par an.

Des raisons budgétaires avant tout

Constatant qu’en 2018, seul 1,4 % des ménages suisses possédant un téléviseur regardaient ses chaînes via la TNT, elle a décidé d’arrêter ce mode de diffusion, ce qui lui permettrait d’économiser 10 millions par an à partir de 2020.

Donc, plus de diffusion par antenne terrestre à compter du 3 juin, comme l’annonce, depuis plusieurs semaines, un bandeau déroulant sur les chaînes concernées. Mais les restrictions sont encore plus larges, puisque la SSR profite de ce changement technologique pour reprendre le contrôle total de ses programmes, à contre-pied des logiques de diffusion mondiale observées dans l’audiovisuel.

« La SSR acquiert les droits des productions tiers (blockbusters, sport, documentaires, etc.) pour le territoire suisse uniquement, explique Lauranne Peman, porte-parole de la direction générale de la SSR. Or, la TNT est une technologie qui permet un débordement naturel des ondes (overspill) au-delà du territoire sur lequel nous sommes autorisés à diffuser ces productions ; il n’y a en effet aucun moyen technique de limiter la diffusion en fonction des frontières. Ce cas de figure, jusqu’alors toléré par les détenteurs des droits, n’a plus de raison d’être avec la fin de la diffusion par TNT. »

Résultat : les chaînes suisses vont également disparaître des bouquets audiovisuels des câblo-opérateurs français, comme SFR (qui proposait les chaînes SRF 1, RTS 1 et RTS 2) ou Vialis (dont les offres comprenaient les chaînes RTS 1, RTS 2, SRF 1 et RSI la 1). « Il n’existe pas de base légale permettant cette pratique, souligne au passage Lauranne Peman. La SSR est un média de service public financé à 75 % par la redevance des ménages suisses et elle acquiert en conséquence les droits de diffusion pour le marché suisse uniquement. Étendre l’acquisition de ces droits à l’étranger pour un marché plus large ne serait financièrement pas viable pour la SSR et ne répondrait pas à son mandat. »

Des droits acquis pour le seul marché suisse

Pour les mêmes raisons de droits d’auteur, les programmes de la SSR relayés par satellite seront désormais cryptés et seuls les ressortissants suisses pourront commander la carte d’accès nécessaire au décryptage (lire l’encadré).

La SSR souligne que ses productions originales (dont elle détient les droits) resteront visibles par les étrangers sur internet, via le site de rattrapage www.rts.ch/play/tv. « En tant qu’entreprise de média, nous n’avons aucun intérêt à restreindre l’accès au contenu que nous produisons », ajoute Lauranne Peman.

Mais pas question de regarder le « direct » sur internet, en tout cas pas depuis une adresse IP française. « Pour des raisons juridiques, cette vidéo n’est visible qu’en Suisse », est-il déjà écrit sur l’écran noir du site de la RTS, sans attendre le black-out total du 3 juin.



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